24 janvier 2009

Panpan cucul

Les enfants bravent souvent l’interdit jusqu’à ce qu’une petite claque (oui ,je sais, c’est pas bien de frapper les enfants) leur montre la limite à ne pas dépasser. Le publicitaire, c’est bien connu, est un grand enfant. C’est positif quand cela lui donne fraîcheur et candeur, ça l’est moins quand il utilise cette créativité pour contourner la loi.

Prenons le cas de la publicité pour les voitures qui nous ont été présentées pendant longtemps roulant en pleine nature. Les «créas» ont commencé par s’exonérer de la contrainte réglementaire (ndlr : il est interdit de représenter un véhicule en dehors des voies autorisées) en apposant un chaste «tourné à l’étranger» - sous-entendu c’est plus responsable d’aller bousiller la nature des autres …. La manœuvre devenant éculée (sans N), le nouvel artifice a été de ne mettre personne au volant … ben voyons, la voiture s’appelle Immaculée Conception et elle est arrivée toute seule au pied de cette cascade idyllique comme le Petit Jésus, bouh la vilaine !

Le développement durable est devenu tellement tendance qu’il est très tentant pour les communicants d’invoquer un argument écologique même si la réalité est toute autre(augmentation + 300 % des messages utilisant ce levier entre 2006 et 2007).

Même si la réglementation existe, les entreprises sont joueuses et prennent le risque d’être interpellées à posteriori, à défaut d’être sanctionnées. Parfois les entreprises pensent que la fessée sera évitée si le mensonge est «petit». Elles vont ainsi jouer sur les mots, leur ambiguïté, leur double sens et Dieu (qui n’existe pas) sait que la langue française en est riche ! Mais en matière de communication, que le mensonge soit petit ou gros les publicitaires devraient savoir que c’est irresponsable "sinon tu trompes la confiance que tes parents ils ont mis à l'intérieur de toi..." et accessoirement la confiance du consommateur et du citoyen.

C’est ainsi qu’avec un aplomb éhonté le géant du nucléaire Aréva avait choisi dernièrement pour signature «L’énergie au sens propre» ! Sous la pression «sociétale» elle vient de s’engager à suspendre de façon provisoire (renoncer aurait été trop demander ?) son utilisation après néanmoins l’avoir utilisée dans des centaines de milliers d’euros de plan media. Mais ce garnement doit aimer la flagellation : c’est en effet un récidiviste qui avait déjà brillé par son célèbre «Nos énergies ont de l’avenir, un avenir sans CO2» qui lui avait d’ailleurs valu en fin d’année d’obtenir le Prix Pinnochio !

21 janvier 2009

Consubstantiel, toi-même !

Question pour un champion (du greenwashing ?) : "Le développement durable est consubstantiel de l’ADN de mon entreprise" …. Mais de quelle entreprise parlait donc ce directeur de la communication lors de la présentation du rapport d’étape de l’Union des Annonceurs, un an après le lancement de la Charte de la Communication Responsable de ce syndicat professionnel ? Réfléchissons un peu … sûrement d’un très bon élève du DD, un pionnier du bio ou du commerce équitable, un entrepreneur des énergies renouvelables, une coopérative exemplaire de l’économie sociale et solidaire, … Non, de Procter & Gamble, tout simplement !

Crier sa vertitude si fortement quand on est encore si jeune dans sa conduite du changement c’est dénigrer les entreprises pionnières qui ont véritablement pensé ou repensé leur projet d’entreprise par le filtre du développement durable. Avoir lancé une lessive à froid (Ariel Actif à froid) ne doit pas donner ce type d’ailes d’autant que concernant ce produit c’est oublier les impacts non négligeables de ses composants chimiques et que cette initiative sur un seul produit lessiviel cache une forêt de multiples produits dont l’ADN est tout sauf écologique. Pourtant le marché des produits d’entretien et des lessives compte aujourd'hui des acteurs réellement engagés qui se donnent des cahiers des charges drastiques sur toute leur gamme (Ecover, Etamine du Lys, Sonett, ….)

Alors, même si cette charte et ses premières bonnes pratiques associées sont une très bonne chose, il lui manque sûrement un engagement sur la façon dont on parle de son éco-responsabilité à l’instar de la déclaration environnementale encadrée par l’ISO 14021. Que diable, un peu de mesure et une pincée d’humilité ! Rappelons-nous que pour communiquer sur son développement durable il faut faire avant de dire. Qui dit faire dit dépasser les mesures cosmétiques pour agir de façon forte sur tous les impacts majeurs de son activité, pas sur l’accessoire. Et l’on sera bien avisé d’attendre d’avoir fait beaucoup pour communiquer un peu sur ce credo comme de proportionner son plan média aux efforts et aux investissements réalisés.

18 janvier 2009

Mouiller la chemise

Voilà, je viens de terminer une nouvelle journée de formation, une sensibilisation au développement durable et à ses enjeux, et comme à l’habitude, je suis vanné. L’age peut-être ? Ca fait rigoler ma femme quand j’ose parler de cet épuisement post-formation. «T’as travaillé, quoi !». Elle a raison, c’est manquer de respect aux personnes qui triment 8 heures par jour à l’usine, que de se plaindre ainsi.

Mais il faut quand même sacrément mouiller la chemise pour bien jouer cette pièce. J’ai peut-être l’immodestie de penser que cela s’apparente à un numéro d’acteur. Le public change tous les jours … il réplique le bougre ! … et je ne connais pas son texte ! En permanence, il faut ménager la chèvre et le choux, donner envie tout en étant exigeant, n’oublier personne sur le bord du chemin, savoir répondre aux colles et au paradoxes comme savoir reconnaître parfois ne pas savoir. «Vous faites un numéro d’équilibriste» me disait l’autre jour une cliente qui regardait d’un œil amusé les échanges avec ses salariés.

De temps en temps le découragement pointe, quand on a été moins «bon». Mais le réconfort et la félicité aussi comme quand ce soir un élève vient me voir après le cours et me demande de «continuer comme ça» et s’excuse presque du comportement de ses condisciples. Je le remercie et le rassure, le scepticisme n’est pas propre aux étudiants, dans tout corpus qu’on forme, y compris en entreprise, je retrouve toujours le passionné, l’hyper sceptique, le cynique, …. car ce panel est tout simplement le reflet de la société, ni plus, ni moins.

Et puis, il faut qu’il ait du débat, c’est de ces échanges que chacun se nourrira et se forgera son intime conviction. C’est bien parce qu’il faut répondre à tous ces doutes, parfois ces angoisses que c’est épuisant, mais c’est aussi pour cela que ce challenge sans cesse renouvelé est aussi passionnant. Comme aujourd’hui d’arriver à convaincre Quentin que se lever de son lit pour aller éteindre la veille de sa télé ce n’est ni remettre en question son confort ni le plaisir de la vie, alors imaginez la gageure de vendre le facteur 4 et d’expliquer tout le potentiel de créativité et de plaisir du « ré-imaginer le monde » que peut être le développement durable ...

05 janvier 2009

Le siècle des gens ordinaires

Depuis le Sommet de la Terre de Rio, Transparence et Concertation sont les maîtres mots de la bonne gouvernance de la société, des états comme des entreprises. Cette nouvelle(?) façon de prendre les décisions est favorisée par les capacités des technologies de l’information et notamment du Web 2.0, oh combien participatif.

La société civile, le citoyen, le consom’acteur ont ainsi repris la maîtrise de l’information qui est désormais "partagée" . Ces acteurs reprennent de fait le pouvoir de la démocratie jusqu’à parfois remettre en cause ses filtres, ses médiums, ses experts et ses représentants officiels ou aristocratiques : politiques, journalistes ou intellectuels par exemple. La fracture de jugement constatée sur le sujet de la Constitution Européenne en a été une évidente illustration. Plus récemment, le véritable succès du Grenelle estpeut-être d’avoir redonné toute son importance à ces acteurs de terrain, ces "forces vives".

Un chef indien déclarait que "le 21ème siècle serait celui des gens ordinaires". Celle de la démocratie participative, de la vigie citoyenne, de l’intelligence collective ? …

Cette mise en bouche en guise d’introduction de la table ronde "Vigie citoyenne pour une intelligence collective" que j’animerai au Palais du Commerce à Lyon le lundi 19 janvier prochain à l’occasion des 5èmes Assises Nationales du Développement Durable.